Le RN à l’Assemblée, le “néant voulu”
L’enquête identifie néanmoins une faille dans la stratégie du RN. L’image qui résulte de cette stratégie de l’esquive permanente est floue et marquée par l’imprécision. Exemple frappant : pour nombre de participants, impossible de citer spontanément le nom d’un député RN… à l’exception de Jordan Bardella, qui ne siège pourtant pas dans l’hémicycle.
« Ils ne se font pas remarquer, ils sont terriblement proprets, sans aucune tâche.» Andrée, 55 ans, Wasquehal (Stabilisateurs)
Une enquêtée résume l’image associée aux députés RN en une phrase : « c’est le néant voulu ». Ce vide, perçu comme imposé par un parti centralisateur et autoritaire, est à double-tranchant, permettant à la fois de faire baisser le niveau de dangerosité associé aux députés en leur conférant le bénéfice du doute, mais produisant dans le même temps une certaine invisibilisation, et renforçant la perception d’amateurisme.
« S’ils proposaient des choses radicales, ça se saurait ! » Henry, 53 ans, Vemars (Stabilisateurs)
« Sur le dossier des retraites, il n’y avait aucune idée, aucune contre-proposition, on ne sait pas ce qu’ils pensent en fait. » Sandrine, 44 ans, Léognan (Libéraux optimistes)
La « facho-anxiété » comme ultime repoussoir
« Dangereux ». Cet adjectif revient spontanément une vingtaine de fois au cours des discussions, preuve que l’effort de dédiabolisation n’a pas entièrement atteint ces groupes. Pour cette France modérée, le RN est bien d’extrême droite, qualifié de « raciste », « extrémiste », « méchants ». Autre signe d'une immunisation persistante : l’invective du député Grégoire de Fournas, « qu’il retourne/qu’ils retournent en Afrique », a marqué les esprits, comme une confirmation de la réalité de l’identité du RN au-delà de la stratégie adoptée.
« Je les trouve dangereux parce qu’on ne les remarque pas. On a l’impression qu’ils font tout pour se racheter une virginité : c’est très sournois. »
Andrée, 55 ans, Wasquehal (Stabilisateurs)